Le scolyte de l’épicea, l’avez-vous vu ?
Publié le 14 février 2019 par Parc Naturel Régional des Ardennes
N’avez-vous pas remarqué ces derniers mois en vous promenant en forêt un rougissement important des aiguilles de certains conifères ?
C’est vrai que les aiguilles du mélèze jaunissent à l’automne puis tombent… mais c’est le cycle naturel de cette espèce.
Néanmoins, ce n’est pas du mélèze dont il question en ce moment mais bien de l’épicéa commun, principale essence résineuse de reboisement sur notre territoire, subissant des attaques de l’Ips typographe (grand scolyte de l’épicéa)
Ips typographe, qui es-tu ?
Il s’agit d’un coléoptère pouvant atteindre une longueur de 4 à 6mm. Présent naturellement dans toute l’Europe, il est un des ravageurs les plus importants des forêts résineuses et plus spécifiquement de l’épicéa.
Cycle biologique
NB : Un autre scolyte, le calcographe, d’environ 1,3 mm est responsable de dégât dans les jeunes peuplements mais peut aussi s’associer au typographe sur les mêmes arbres dans les cimes et les branches
En début de saison, le typographe essaime lorsque les températures dépassent 18 à 20°C pendant plusieurs jours sans pluie.
Les mâles pénètrent sous l’écorce des épicéas après leur envol puis aménagent une chambre nuptiale. De nouveaux individus mâles et femelles arrivent. Après leur fécondation, les femelles creusent des galeries dans le bois et y déposent des oeufs.
Les larves éclosent puis creusent à leur tour des galeries sous l’écorce (leur développement dure 3 à 6 semaines) avant d’y accomplir leur métamorphose et de devenir des adultes.
Les galeries creusées par les larves et les adultes détruisent le système vasculaire de l’arbre.
En 2018, 3 générations de scolyte de l’épicéa se sont succédées (contre 2 en année normale) suite notamment :
- Aux chablis en forêts liés aux coups de vent de l’hiver 2017/2018,
- A la période de sécheresse en 2018
Ces deux évènements ont simultanément fragilisé les peuplements les rendant ainsi plus vulnérables, et permis une multiplication importante des populations d’insectes. Face à la pullulation des insectes, les épicéas n’ont pu enrayer leurs attaques.
Et les symptômes ?
Une attaque de l’Ips typographe entraîne presque irrémédiablement la mort des arbres touchés. La mort de l’arbre intervient dans les semaines ou mois suivant le développement des scolytes sous l’écorce. Les arbres de plus de 40-45 cm de diamètre représentent la population la plus sensible.
Dans un premier temps, les symptômes sont assez difficiles à identifier :
- Les trous d’entrée des individus adultes : difficiles à repérer, ils sont dispersés sur l’écorce
- La sciure des galeries maternelles évacuées par les insectes qui se retrouve au pieds des arbres ou sur leur écorce
- Des écoulements de résine importants liés à la réaction d’autodéfense de l’épicéa
Puis, les symptômes apparaissant ensuite sont nettement plus visibles :
- Le roussissement des houppiers ou la chute des aiguilles
- Le décollement et l’écaillement des écorces
Le scolyte véhicule des agents de bleuissement (champignons) qui accroissent la dévalorisation des bois colonisés. Le bleuissement est un frein à la commercialisation des bois
Du coup, quoi faire ?
Un suivi attentif des pessières doit être effectué par les forestiers pour évaluer les impacts des scolytes.
- Cet hiver, l’objectif sera de récolter des bois ayant encore une valeur commerciale. Ces exploitations n’auront que peu d’impact sur les populations de scolytes puisque les insectes sont descendus dans la litière et ne reprendront leur activité qu’au printemps prochain.
L’importance des attaques de scolytes en 2018 a déjà eu pour conséquence certaines coupes rases de peuplement d’épicéas sur des surfaces parfois importantes (= coupes sanitaires).
- Au printemps, une inspection précoce et minutieuse des pessières sera notamment effectuée à proximité des anciens foyers et les bois atteints devront être abattus. Ils devront être rapidement évacués des forêts vers les usines de transformation, ou écorcés sur place.
Les conditions climatiques du début de saison seront déterminantes dans la prolifération des insectes. Un printemps humide, défavorable aux insectes, retardera les envols des individus adultes (le froid hivernal ayant peu d’impact sur ces espèces) et limitera la propagation des insectes.